Pax, le chemin du retour by Sara Pennypacker

Auteur:Sara Pennypacker [Pennypacker, Sara]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782075161015
Éditeur: Gallimard Jeunesse
Publié: 2022-05-09T00:00:00+00:00

Samuel avait tiré la courte paille et s’était éloigné dans les sous-bois à la recherche de ruisseaux affluents. Peter et Jade recueillaient de l’eau et des sédiments dans le cours d’eau principal, ici paisible, bordé de lichen d’un vert étincelant.

Jade ressortit et tendit un flacon à Peter. Elle s’appuya contre un tronc à côté de la table de camping et contempla le courant.

– Ce doit être le plus beau paysage qui existe au monde.

Peter, qui collait l’étiquette, sourit.

– D’après Samuel, tu dis la même chose à chaque tournant. Il m’a dit : « Cette fille adore vraiment les rivières. »

– C’est vrai, je les aime. Mais celle-ci particulièrement. Oh, je sais bien qu’elle n’a rien d’impressionnant, avec ses trois ou quatre mètres de large… Assez pour qu’on ne la traite pas de ruisseau, mais de justesse, pas vrai ? N’empêche qu’elle compense largement cette taille réduite par sa détermination.

– Sa détermination ? Comment ça ?

– Elle n’arrête pas de bouger. Rien ni personne ne peut l’arrêter. Comme si elle savait que l’eau stagnante finit par croupir.

Peter posa le flacon et contempla le cours d’eau avec un intérêt renouvelé. Il aimait écouter Jade.

– Et puis ce n’est pas n’importe quelle rivière. C’est la mienne.

– La tienne ?

– Mes grands-parents habitaient tout au bord, un peu plus bas, à une centaine de kilomètres d’ici. Ils y sont encore, d’ailleurs : aucune bataille n’a eu lieu dans leur petit village, et tout le monde possède un puits, donc il n’a pas été évacué. Quand j’étais petite, je passais tous mes étés chez eux. J’avais un canoë, et je connaissais le moindre recoin, le moindre barrage de castors, le moindre nid de cygne. Ce qui veut bien dire qu’elle m’appartient, hein ?

Jade prit un nouveau flacon et retourna barboter. Pendant une heure, ils se concentrèrent tranquillement sur leur routine. La rivière murmurait dans le soleil de la fin d’après-midi. Elle avançait patiemment, sans hâte. Peter sentit son esprit vagabonder au même rythme que le courant paisible.

Jusqu’à ce que Jade le fasse sursauter en lui tapotant le coude. Peter regarda le casier d’échantillons qu’il tenait entre ses mains.

– Quoi ? J’ai fait une erreur ?

Elle secoua la tête et désigna d’un coup d’œil une branche de sapin au-dessus d’eux.

– Tu vois cet oiseau ? La mésange ? Je crois qu’elle meurt d’envie de venir nous faire un petit coucou.

Peter la vit, au moins quatre mètres au-dessus d’eux, occupée à les étudier intensément.

– Elle n’a pas peur, parce qu’elle a des ailes, confirma-t-il. Mais je ne pense pas qu’elle s’approchera davantage.

– Je parie que si. Elle traîne au-dessus de nous depuis qu’on s’est installés. Elle est curieuse. Si on lui en donne l’occasion, elle va descendre. Regarde.

Jade sortit une barre de céréales de sa poche, la leva comme pour la montrer à la mésange et ôta l’emballage avec des gestes lents. Puis elle s’assit en tailleur par terre et tapota le sol à côté d’elle pour que Peter la rejoigne. Le garçon posa son feutre et s’installa confortablement pour observer ce qui se passerait.

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